Ouganda : les ambitions présidentielles du fils aîné du président Museveni, se précisent

Au pouvoir depuis 1986, après le renversement du régime de Milton Obote, le président Yoweri Museveni a été élu en 2021 pour un sixième mandat à la tête du pays. Après avoir fait supprimer la limitation à deux mandats par un amendement constitutionnel en 2005, Museveni a fait de même avec la limite d'âge à 75 ans en 2017. Si le chef de l’Etat ougandais n’a pas annoncé son intention de briguer un 7ème mandat en 2026, son fils Muhoozi Kainerugaba se démarque et laisse transparaitre ses ambitions présidentielles.
Comme dans de nombreux pays africains depuis les années d’indépendance, l’Ouganda risque ne pas échapper à la tentation de la succession dynastique à la tête du pays. En effet, Muhoozi Kainerugaba, le fils ainé du président Ougandais qui a pris sa retraite militaire en mars, à l’âge de 47 ans, alimente les spéculations sur une possible ambition présidentielle lors de l’élection de 2026.
Sur son compte twitter le 08 mars dernier, le général Muhoozi Kainerugaba, fils du président ougandais Yoweri Museveni et commandant de l’armée de terre déclarait : « Après 28 ans de service dans ma glorieuse armée, la plus grande armée du monde, je suis heureux d’annoncer ma retraite. Mes soldats et moi avons accompli tant de choses ! Je n’ai que de l’amour et du respect pour tous ces grands hommes et femmes qui accomplissent chaque jour de grandes choses pour l’Ouganda. »
Cette démission trahit les ambitions de l’homme qui, à la tête des puissantes forces spéciales ougandaises avant de commander l’armée de terre, avait toujours démenti avoir l’intention de succéder à son père, au pouvoir depuis 1986 et aujourd’hui âgé de 77 ans, bien que pour beaucoup d’Ougandais et d’observateurs, son ascension fulgurante au sein de l’armée et l’influence qu’il a toujours exercé au cœur du pouvoir font de lui un successeur tout désigné. Son champ d’action s’est régulièrement étendu au-delà du domaine militaire. Il est connu comme l’homme à tout faire de son père, en tant que « haut conseiller présidentiel chargé des opérations spéciales ».
Ce qui renforce les spéculations
Ce qui est clair est que la Constitution ougandaise n'autorise pas les militaires à s'engager en politique. De fait, elle excluait le chef militaire Muhoozi Kainerugaba, de la course à la présidentielle de 2026. D’ailleurs, un juge ougandais a récemment demandé à la Cour constitutionnelle de poursuivre cette transgression. Avec l’annonce de son départ à la retraite militaire, en mars dernier, ceux qui lui prêtent des intentions présidentielles, ont désormais de quoi alimenter leurs rumeurs. L’écrivain Kakwenza Rukirabashaija qui a fui clandestinement en Allemagne au mois de février, après avoir été arrêté pour avoir insulté Muhoozi Kainerugaba et son père Museveni, fait partie de ceux qui ont toujours spéculé sur les ambitions du fils du président. Lors de l’annonce de la retraite militaire de Kainerugaba, l’écrivain laissait entendre sur son compte twitter : « Là où son père s’arrêtera, le bébé despote commencera. Nous sommes condamnés si nous ne contrecarrons pas ses aspirations naissantes. ».
Au mois d’avril dernier, alors qu'il célébrait son 48e anniversaire par des tournées à travers le pays avec ses supporters, Muhoozi Kainerugaba a publié un message sur twitter, en disant : « Lorsque l'équipe Muhoozi prendra le pouvoir dans ce pays, ce qui est évident, le budget du secteur des sports sera revu à la hausse. Nous annoncerons bientôt notre programme politique ». Rien de plus explicite pour confirmer ses ambitions politiques.
Ses différentes activités sur le terrain ressemblent en effet à une campagne pour les prochaines élections en 2026. Ses nombreux supporters portent des t-shirts avec sa photo et la mention : « Muhoozi, président de l'Ouganda en 2026 ». Aujourd’hui, tout semble désormais clair sur ses aspirations à occuper le fauteuil présidentiel après son père.
Ses fréquentations
Il est né en 1974, à l'époque où son père était engagé dans une rébellion soutenue par la Tanzanie visant à renverser le pouvoir autoritaire d'Idi Amin Dada. Dès l'âge de 25 ans, le fils aîné de l'actuel président est enrôlé dans l'armée ougandaise et fréquente plusieurs écoles militaires, notamment la Royal Military Academy Sandhurst, l'école de formation des officiers de l'armée britannique.

En tant que conseiller particulier de son père Museveni, Muhoozi Kainerugaba aurait, en janvier 2022, aidé son père et le président rwandais Paul Kagamé à se réconcilier après trois années de fermeture de frontières entre le Rwanda et l'Ouganda. Il a également rencontré pour encourager le président rwandais dans une opération militaire conjointe des forces ougandaises et congolaises, lancée l’année dernière contre le groupe rebelle des Forces démocratiques alliées (ADF) dans l’est de la RDC. Sur son compte Twitter, il chante d'ailleurs régulièrement les louanges du président rwandais qui serait un de ses amis. Outre sa double visite à Kigali, il a été envoyé par son père auprès de l’Égyptien Abdel Fattah al-Sisi, chez le Kenyan Uhuru Kenyatta (à deux reprises) et chez le président Sud-Africain Cyril Ramaphosa.
Muhoozi Kainerugaba est aussi connu pour ses tweets en soutien à Vladimir Poutine et à la guerre contre l'Ukraine ; l’ambassade de Russie à Kampala n’a pas manqué de lui souhaiter un bon anniversaire, lors de la célébration en avril dernier.
En effet, selon le journaliste ougandais Andrew Mwenda –qui dit être un proche confident du fils du président–, Muhoozi Kainerugaba, est le président des partis communistes du Vietnam, de Chine, de Cuba, de Corée du Nord, des républiques d’Afrique de l’Est et d’Afrique centrale, le commandant en chef de toutes les forces révolutionnaires en butte à l’impérialisme et au néocolonialisme, ainsi que le chef suprême des peuples d’Afrique de l’Est et d’Afrique centrale.
Son anniversaire en Avril : Le pas vers la présidence.
L’unique fils de Yoweri Museveni –qui a également trois filles – a encore fait parler lors de la célébration de son 48ème anniversaire en avril dernier, en conviant plusieurs invités de hauts rangs : le chef de l’État kenyan, Uhuru Kenyatta qui, n’a pas fait déplacement de Kampala. Il a surtout invité Paul Kagame du Rwanda qui, lui, était présent.

Cet anniversaire a été l’occasion de voir une mobilisation sans précédent dans le pays, à la seule gloire du fils du président ougandais. A la faveur, des fêtes ont résonné dans plusieurs régions d’Ouganda. De la nourriture et des boissons ont distribuées gratuitement aux populations. Des spectacles ont été donnés… A son arrivée au pays après près de deux ans, pour son anniversaire, une gigantesque foule, était venue l’accueillir à l’Aéroport de Koloko à Kampala. Une horde de hauts gradés avaient fait le déplacement. Parmi eux, le général Leopold Kyanda, chef d’état-major de l’Armée ougandaise ; le général Don Nabasa, commandant de la Police militaire et ancien commandant du Commandement des forces spéciales (SFC) ; le général James Birungi, chef du Renseignement militaire ; le général Johnson Namanya, actuellement affecté au bureau de l’immigration et le général Chris Serunjogi Ddamulira, chef du Renseignement criminel. Les généraux Felix Busizoori, actuel patron du SFC chargé notamment de la protection de la famille présidentielle, et son adjoint, Charity Bainababo furent aussi présents, entre autres.
Sa fulgurante ascension, ses nombreuses fréquentions à l’international (…) présagent un futur qui annonce quelques couleurs –dont ont ne peut définir la nature – en Ouganda. Dans la sous-région Afrique de l’Est, les spéculations vont bon train sur le remplacement de Yoweri Museveni 36 ans de règne, à la tête de l’Ouganda. Au pays, certaines voix annoncent un risque d’implosion, surtout à l’intérieur du Mouvement de la résistance nationale (NRM), le parti au pouvoir. A la question de savoir s’il est le futur président du pays, ses partisans pensent que Muhoozi Kainerugaba a l’étoffe nécessaire pour remplacer son père en 2026. Lui-même ne cache plus aucune ambition, surtout depuis sa retraite militaire en mars dernier.
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